Les travailleuses et les travailleurs du CSSS de la région de Thetford Mines sont inquiets face aux répercussions qu’aura sur la région le projet Optilab visant à centraliser les laboratoires médicaux du Québec. Malgré l’annonce de transferts de personnel dès avril 2017, le gouvernement se montre incapable actuellement de répondre à des questions pressantes, ce qui jette un doute sur la viabilité d’Optilab. La CSN demande qu’un moratoire soit décrété sur cette réorganisation majeure le temps d’en évaluer correctement les conséquences.

Optilab prévoit que toutes les analyses médicales non urgentes de produits sanguins ou de tissus humains, par exemple pour le dépistage du cancer, prélevés dans la région, seront désormais traitées à l’Hôtel-Dieu de Lévis. À terme, près de 50 emplois de technologistes médicales seront perdus aux laboratoires de Thetford Mines, de la Beauce et de Montmagny, ce qui toucherait 57 personnes. Environ 25 emplois seront créés à Lévis. Si les technologistes médicales sont en première ligne, la réorganisation touche également d’autres travailleurs et travailleuses, dont le personnel administratif et les techniciennes et techniciens en génie biomédical.

Des risques pour la population
« Nous sommes inquiets pour les citoyennes et les citoyens de la région », explique la présidente du Syndicat des travailleurs et travailleuses du Centre de santé et des services sociaux de la région de Thetford–CSN, Lina Marois. « Inévitablement, le traitement des échantillons à 100 kilomètres d’ici veut dire des délais supplémentaires en raison du transport et de la manipulation accrus, des risques plus importants de perdre des échantillons ou de les endommager et une perte d’expertise dans les établissements de la région. Ce qui va arriver, c’est que des gens vont devoir parfois reprendre leur test. Leur médecin traitant obtiendra les résultats quelques jours plus tard qu’actuellement. Et les risques d’erreur sont décuplés. Pour nos membres qui travaillent au quotidien dans les laboratoires médicaux de la région, ces risques sont bien réels, mais ils n’ont pas le sentiment d’être entendus. »

Aperçu des conséquences à Thetford Mines
Avant même l’implantation complète d’Optilab, les travailleuses et travailleurs constatent déjà des défaillances sur le terrain dans le transport d’échantillons entre les établissements. En une seule journée, fin septembre, on a dû reprendre les prélèvements sur 28 patients parce que des échantillons ont été perdus par le transporteur privé qui fait la navette entre les établissements de la région. Le 26 octobre, neuf prélèvements ont été reçus à Lévis sans l’information nécessaire à leur analyse. C’est la même entreprise qui serait chargée de transporter les échantillons dans le cadre d’Optilab.

La durée de vie de tels échantillons est en moyenne de 4 heures. À terme, Optilab nécessitera environ six transports par jour entre l’hôpital de Thetford Mines et Lévis. On peut certainement craindre que de telles erreurs se multiplient et qu’il sera encore plus difficile de les corriger lorsque toutes les analyses seront concentrées au même endroit. C’est sans parler des tempêtes, des accidents ou de tout autre imprévu qui pourraient perturber le transport.

Pour la vice-présidente de la Fédération des professionnèles (FP–CSN), Nancy Corriveau, le projet Optilab est bien mal engagé. « Le ministère de la Santé et des Services sociaux a beau clamer qu’il réalisera des économies, dans nos rencontres avec eux, ses représentants nous ont avoué qu’ils ne savent même pas combien cela coûte actuellement. En plus de l’ajout d’équipements et de l’agrandissement des installations dans les laboratoires « serveurs » comme celui de Lévis, il faut compter les coûts de transport et de manipulation accrus, ainsi que le coût de toutes les analyses qui devront être reprises en cas de défaillance du système. »

« En général, les gens n’ont aucune idée de ces coûts et des risques que cela implique », poursuit le vice-président régional de la Fédération de la santé et des services sociaux (FSSS–CSN), Denis Bertrand. « Nous allons continuer toutes nos interventions au niveau national ainsi que dans les communautés, comme ici, à Thetford où nous nous déploierons dans les prochaines semaines à la rencontre de la population qui doit savoir de quoi il retourne  ».

Enjeu économique
Le Conseil central de Québec­Chaudière-Appalaches (CSN) soutient la lutte contre la perte des laboratoires médicaux des hôpitaux plus éloignés et des emplois qui s’y rattachent. « Pour Thetford Mines, Optilab, c’est une catastrophe économique », dénonce la présidente de CCQCA–CSN, Ann Gingras. « L’économie régionale est déjà durement frappée par la perte de bons emplois qualifiés, bien rémunérés. C’est renversant de constater à quel point le gouvernement ignore les dommages irréparables qu’il impose au tissu social de la région. On est en train de dire aux citoyennes et aux citoyens de la région qu’il faut déménager à Lévis si on veut de bons emplois et une meilleure qualité de services publics. Le ministre Barrette, de par ses gestes, contribue à vider les régions. C’est inacceptable. Les élus municipaux de la région se sont déjà prononcés dans ce dossier. Nous n’attendons rien de moins du député de la région Laurent Lessard, car les enjeux sont énormes pour tout le monde ».

Comité syndical–patronal
Le 10 novembre, un comité composé de technologistes médicales membres de la CSN a rencontré des représentants patronaux des établissements. Plusieurs autres rencontres se tiendront au fil des prochaines semaines. Ce comité de travail, prévu aux conventions collectives de la CSN, doit permettre de formuler des recommandations au ministère, notamment sur Optilab. Pour la CSN, on devrait instaurer un moratoire immédiat sur le déploiement d’Optilab, le temps d’en évaluer tous les impacts et de trouver des solutions.

Campagne

La demande de moratoire sur le déploiement d’Optilab s’inscrit au cœur du plan d’action de la CSN dans le cadre de la campagne Ma place en santé, j’y tiens. Plus d’information au : www.maplaceensante.com

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