Le plan d’action numérique en éducation et en enseignement du gouvernement est à peine dévoilé qu’il soulève déjà plusieurs questions pour la Confédération des syndicats nationaux (CSN) et ses fédérations membres. Pour la Fédération nationale des enseignantes et des enseignants (FNEEQ-CSN), la Fédération des profesionnèles (FP-CSN) et la Fédération des employées et employés de services publics (FEESP-CSN), le plan de plus de 80 pages apporte bien peu de précisions et contribue surtout à créer un climat d’incertitude pour les travailleuses et les travailleurs du milieu de l’éducation, et ce, quant à chacune des trois orientations.
« Le plan ne prévoit pas de comité directeur pour la mise en œuvre de ce vaste chantier, soulève Véronique de Sève, vice-présidente de la CSN. C’est le néant quant à l’intégration des partenaires dans l’élaboration de la stratégie, rien ne précise le rôle qu’ils devront jouer, quels objectifs ou axes doivent être développés par qui, dans quel ordre ou à quel moment. Bref, c’est un plan sans acteurs. Pour éviter un développement chaotique, nous réclamons la mise en place d’un comité incluant les représentantes et représentants des organisations syndicales et étudiantes. »
« D’entrée de jeu, on constate que le gouvernement mise sur la formation de tous les titres d’emploi, explique Sylvie Tremblay, vice-présidente-trésorière de la FEESP. C’est une bonne intention, mais il n’y a aucun détail concernant la mise en place de cette formation. Il n’y aucun calendrier prévu pour ces formations et nous savons déjà que les employé-es du milieu de l’éducation manquent de temps pour accomplir tous les volets de leur tâche. Impossible également de savoir qui donnera ces formations et si du personnel supplémentaire sera embauché pour les donner. Il en va de même pour la mise en place, le soutien technique et l’entretien. Il est important de ne pas recourir à des sous-traitants provenant du privé, et de plutôt privilégier la compétence du personnel du secteur public. »
« Concernant certains points plus précis du plan, le gouvernement souhaite mettre sur pied un campus virtuel et déployer davantage la formation à distance, remarque Caroline Quesnel, présidente de la FNEEQ. Il faut faire attention à ce que la formation virtuelle serve réellement à rendre l’éducation plus accessible sur le plan géographique et ne constitue pas une alternative « bon marché » à un enseignement en présentiel. En ce qui a trait au projet de campus virtuel, nous avons plusieurs craintes voulant que cette plateforme contribue à nourrir la concurrence entre les établissements, notamment par la course à la « clientèle » étudiante internationale. Nous craignons aussi une standardisation de la formation en enseignement supérieur. Les initiatives actuelles en formation à distance comportent aussi des écueils quant à la sous-traitance de l’enseignement, comme c’est le cas à la TÉLUQ. Le plan doit interdire ces dérives. »
« Nous sommes également préoccupés par la question de l’autonomie professionnelle, poursuit Louise Briand, vice-présidente de la FP. Il est impensable de mettre en place une stratégie qui aura des impacts potentiels sur la liberté académique, sur le droit d’auteur et sur la façon d’enseigner sans respecter la latitude qu’ont les professeurs. »
« Le gouvernement parle à plusieurs reprises du développement des compétences numériques, s’inquiète Véronique de Sève. Or, ces fameuses compétences ne sont jamais clairement définies, ce qui est particulier dans un plan qui touche l’éducation. On souhaite développer des compétences, sans savoir lesquelles. Nous craignons également que le programme mis en place pour le développement de ces compétences se fasse au détriment des autres matières enseignées. Il faut éviter de tomber dans un simple effet de mode qui répond aux impératifs des entreprises sans avoir de vision globale de l’éducation. »
« Ça fait maintenant quelques mois que le gouvernement délie les cordons de la bourse et annonce de grandes réformes et de grands chantiers. On sent bien que la campagne électorale est lancée officieusement. Voilà pourquoi nous ne lançons pas ces questions qu’au gouvernement, mais à tous les partis politiques. Nous souhaitons avoir l’heure juste et savoir où se situe chacun des partis quant au plan dans son ensemble et par rapport aux multiples questions qu’il soulève », conclut Véronique de Sève.
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