L’aide juridique permet à la population, particulièrement aux personnes économiquement défavorisées, un accès à la justice réel et efficace. Dans les années 80, le gouvernement du Québec avait d’ailleurs procédé à un choix déterminant en reconnaissant aux avocates et aux avocats de l’aide juridique et aux procureurs de la Couronne une égale importance dans le système judiciaire québécois. Cette reconnaissance s’est traduite au fil des ans par la parité salariale entre les deux groupes de travailleurs, grâce à des revendications défendues haut et fort par les avocats de l’aide juridique. Or, pour une cinquième fois en 35 ans, ceux-ci sont obligés de se battre afin de maintenir ce principe de parité pourtant établi de longue date. Pourquoi doivent-ils toujours sortir l’artillerie lourde pour pouvoir continuer à bénéficier des mêmes conditions que celles de leurs consœurs et confrères de la Couronne? Il n’y a là aucune nouvelle demande, simplement le maintien d’un principe qui leur a été accordé depuis longtemps!
En 2002, la juge en chef du Canada, Beverley McLachlin, affirmait que l’aide juridique est un service public essentiel pour les Canadiennes et Canadiens à faible revenu et qu’il doit être considéré de la même façon que les soins de santé et d’éducation. Le gouvernement est-il d’accord avec cette vision des services d’aide juridique? On peut fortement en douter, à voir la façon cavalière avec laquelle il traite ces travailleuses et travailleurs. Cette attitude nous permet même de nous questionner sur sa bonne foi… Les juristes de l’État, qui ont été soumis à une loi spéciale pour forcer leur retour au travail, soulèvent actuellement les mêmes interrogations devant les tribunaux. Eux aussi demandaient, entre autres, la parité avec les procureurs de la Couronne.
Les avocats de l’aide juridique défendent des personnes vulnérables selon les mêmes règles, la même éthique et au sein du même système judicaire que les procureurs de la Couronne. Ils plaident devant toutes les instances judiciaires et quasi-judiciaires tant en matière civile et criminelle que familiale, administrative et d’immigration. Environ 75 % de tous les dossiers de nature criminelle ou pénale entendus par la Cour du Québec impliquent des personnes ayant fait appel à leurs services. Voilà qui démontre bien l’importance de ce service essentiel dans l’administration de la justice au Québec. Les conditions de travail de ces avocats doivent refléter la réalité.
Malheureusement, le Conseil du trésor se laisse tirer l’oreille, comme lors de chaque négociation avec eux, et retient les mandats qui permettraient à l’aide juridique d’enfin régler la convention collective, échue depuis le 31 juillet 2015. Pour cette raison, l’aide juridique a récemment procédé au dépôt d’une offre qui est loin de respecter le principe de parité avec les procureurs de la Couronne.
Sans la parité, la capacité de l’aide juridique à recruter et à retenir les bons éléments serait mise à mal. Par le fait même, ce sont les services juridiques aux personnes les plus démunies de la société qui seraient compromis. Comme le passé est garant de l’avenir, on peut d’ores et déjà affirmer que la pression sera maintenue sur le gouvernement aussi longtemps qu’il le faudra. Les avocates et avocats viennent d’ailleurs de se voter une journée de grève. Il serait bien plus judicieux pour le gouvernement d’agir afin de régler dès maintenant cette négociation et de réaffirmer par le fait même le principe de l’accès à la justice pour tous.
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